par Robyn Alders, Centre international d'études sur la volaille rurale (IRPC), Fondation Kyeema, Brisbane (Australie) et Maputo (Mozambique)
- Faculté des sciences vétérinaires, Université de Sydney, Camden (Australie)
Introduction
L'élevage de volailles à l'échelle familiale demeure primordial ; on estime que 80 % des réserves mondiales de volaille sont gardées en petites quantités (un à vingt animaux). L'élevage familial de volailles joue un rôle prépondérant dans de nombreux foyers d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, assurant aussi bien la nourriture et l'équilibre nutritif qu'un gagne-pain, et permettant la conservation d'espèces indigènes. Le présent article se concentre sur la « basse-cour familiale » en Afrique, notamment sur la production de volailles extensive ainsi qu'à petite échelle intensive.
Dans le contexte africain, la volaille peut comprendre une large gamme de volatiles, indigènes mais aussi des races commerciales : poulet, canard musqué, colvert, pigeon, pintade, oie et dinde. De tous ces oiseaux, le poulet est le plus fréquemment commercialisé et, par conséquent, le plus étudié du point de vue des chaînes de valeur.
Volailles et êtres humains ont des destins communs dans bien des parties de l'Afrique. Cette cohabitation constitue souvent un élément essentiel du tissu social dans une large variété de cultures. Les chaînes de valeur incluent les aspects socio-culturels du système alimentaire ; leur analyse s'intéresse aussi à l'environnement institutionnel au sein duquel la nourriture est produite, transformée, commercialisée, détaillée et consommée. Les règlements formels (législation publique et normes privées), les règles informelles (aspects socio-culturels) et leur mise en œuvre ont une influence certaine sur les chaînes de valeur et sur les performances du système d'innovation au sens le plus large.
Figure 1: Répresentation universelle d'une chaîne de valeur d'évalage de volailles à l'échelle familiale
Comme on le voit dans la figure 1, un large éventail d'acteurs ont leur rôle à jouer dans les chaînes de valeur d'élevage familial de volailles et doivent être pris en compte si l'on veut que science et innovations contribuent à leur amélioration. Les services volaillers comprennent toute une gamme d'intrants, y compris la recherche, la formation, le personnel vétérinaire, la vulgarisation et des services-conseils.
Comparés à l'industrie commerciale de la volaille, l'élevage familial a reçu au cours du siècle passé un investissement limité, que ce soit de la part de la recherche, de la vulgarisation, de la finance ou des agences de développement. Malgré tout, l'élevage familial de volaille persiste, du fait même de ses faibles coûts inhérents et de sa rentabilité extrêmement élevée. Le développement et l'introduction d'interventions idoines concentrées sur les facteurs limitant la productivité dans chaque système de production et l'efficacité des diverses chaînes de valeur doivent impérativement être adaptés aux conditions nationales et locales.
Production
Dans le contexte de l'élevage familial de volaille, les éleveurs se composent des hommes, des femmes et des enfants vivant au foyer. La démographie des producteurs varie selon les systèmes de production : les femmes et les enfants sont plutôt propriétaires d'élevages villageois extensifs et prennent soin des bêtes ; les hommes ont tendance à posséder des petits élevages intensifs et à fournir la main-d'œuvre. La raison qui préside à la production de volaille varie elle aussi, selon qu'il s'agisse de fournir une source de liquidités et de nourriture pour le foyer, ou d'un projet commercial à risque. Comprendre qui possède et qui prend soin des volailles est un élément crucial, dans la mesure où hommes, femmes et enfants ont tous des éducations, des origines linguistiques et culturelles différentes, ainsi que des accès aux services inégaux.
La taille d'un cheptel familial résulte souvent d'un équilibre entre les ressources alimentaires locales, les besoins du foyer et la fréquence des maladies. C'est la faculté des volailles – notamment indigènes – à survivre au sein des systèmes à faible investissement qui rend ces systèmes de production si résistants et en fait un parfait exemple de production animale écodurable qui se complète fort bien avec le mélange d'agriculture et de sylviculture. Plusieurs innovations, dont les familles d'éleveurs bénéficient actuellement (par exemple, la production de vers donnés aux oiseaux), découlent d'une élaboration faite à partir de connaissances indigènes qui ont été divulguées à des publics plus larges.
L'élevage extensif en plein air tend à être le plus durable écologiquement, puisque les oiseaux se nourrissent d'aliments localement disponibles, utilisent l'eau disponible – y compris les eaux usées du ménage – et fournissent du guano qui va enrichir le sol des potagers. La volaille participe aussi au contrôle des vermines, joue un rôle essentiel dans les traditions culturelles et dans la préservation de la biodiversité en faisant perdurer les espèces indigènes. La durabilité des petits élevages intensifs et semi-intensifs fait actuellement l'objet de recherches qui s'intéressent aux sujets suivants : identification des aliments disponibles sur place et pouvant être produits en quantités suffisantes ; compostage des détritus ; utilisation de la distribution alimentaire de type « cafétéria » où les volailles reçoivent des sources diverses de protéines, de glucides et de calcium qui leur permettent de choisir le type d'aliments nécessaire pour compléter la consommation.
Il peut être très avantageux d'inclure l'éducation sur l'élevage familial de volailles (extensif, intensif et semi-intensif) dans les programmes éducatifs des cycles primaire, secondaire et supérieur. À l'heure actuelle, s'il est vrai que les institutions d'enseignement supérieur offrent des cours d'élevage familial de volaille dans leurs programmes, ceux-ci sont le plus souvent consacrés à la production intensive.
Le projet « Poulet Zoulou » fournit un excellent exemple de l'influence positive au-delà de la sécurité alimentaire améliorée que peut apporter le travail main dans la main avec des petits éleveurs de volaille.
Étude de cas : Amélioration du Poulet Zoulou – Poulet du village d'Umzimkhulu – Projet d'amélioration Les poulets de village, aussi appelés poules fourragères ou poulets zoulous, font partie intégrante du paysage dans les terres colonisées d'Afrique du Sud. Bien que très répandus, les familles mangent rarement les poulets et presque jamais leurs œufs. La raison principale en est le taux de mortalité élevé des oiseaux et la faible production d'œufs. Il est donc difficile d'augmenter le cheptel moyen d'une famille, qui est d'environ cinq poules et un ou deux coqs. Pourtant, avec un peu d'argent, de temps et de soin, il est possible d'améliorer la productivité des volatiles, fournissant ainsi aux familles non seulement une source de viande et d'œufs facilement accessible mais aussi un surplus d'oiseaux pour la vente et le troc. Le Projet d'amélioration des poulets du village d'Umzimkhulu, dirigé par Ed Wethli, a été lancé en mai 2010 en partenariat avec le Département provincial de l'agriculture et avec l'Institut de la volaille du KwaZulu Natal (KZNPI). Wethli s'était rendu compte que les poulets de village ont assez de potentiel génétique pour réagir favorablement à une meilleure gestion ; il a donc fixé comme objectif de transformer les éleveurs passifs du village en éleveurs actifs, en ayant recours à des compétences de gestion volaillère basique. Au total, quatorze participants – dont dix femmes – ont été choisis dans les trois villages que compte la commune d'Umzimkhulu. La première étape a consisté pour eux à assister à une journée d'atelier au KZNPI où ils ont appris une collecte de données basique. Il y eut ensuite un cours d'une semaine où on leur enseigna une panoplie de techniques de gestion et d'agronomie : 1 Contrôle des maladies : comment réduire la mortalité due à la maladie de Newcastle, à la peste aviaire ainsi qu'à d'autres affections ; 2 Contrôle des parasites : comment réduire l'effet nocif des parasites tels que puces, poux, tiques et vers intestinaux ; 3 Amélioration des abris : comment bâtir des constructions simples avec des nids où les oiseaux peuvent passer la nuit, ce qui réduit la prédation et facilite la gestion ; 4 Protection des poussins : méthodes pour réduire leur mortalité, notamment durant les quatre à cinq premières semaines de leur vie ; 5 Alimentation complémentaire : les jeunes poussins ont besoin d'un régime équilibré ; on a encouragé les fermiers à pratiquer des récoltes convenant à leurs poussins ; 6 • Gestion des œufs : comment s'assurer que le nombre d'œufs destinés à la consommation familiale augmente, ainsi que de ceux destinés à la vente ; 7 • Reproduction sélective : comment distinguer les coqs et les poules de qualité et de santé supérieures, comment les faire se reproduire, et pourquoi est-il essentiel de réformer les types inférieurs ; on a découragé fortement les participants d'avoir recours à des espèces exotiques – les poulets indigènes sont les mieux adaptés aux conditions locales ; 8 • Collecter les données : comment tenir un décompte simple des vaccinations, des pontes, des couvées et d'autres détails ; 9 • Commercialisation : si un foyer commence à produire assez de poulets, il aura peut-être la possibilité d'en vendre, soit à des consommateurs soit à des bouchers citadins. Après les cours, on visitait régulièrement les fermes. Six mois plus tard, chaque critère de l'élevage volailler s'était amélioré. La taille moyenne des cheptels avait augmenté, passant de 19 à 29 bêtes par foyer ; la mortalité avait diminué dans 62 % des foyers et le contrôle des maladies s'était accru d'un taux de 82 %. Un peu plus d'un tiers des participants avait commencé à ramasser des œufs et de nombreux éleveurs avaient recours à la reproduction sélective. Un an plus tard, vers la fin 2011, la situation semblait encore meilleure, avec en moyenne 43 bêtes par foyer. Mais la meilleure nouvelle, c'est que tous les participants mangeaient bien mieux ! Avant le démarrage du projet, chaque foyer mangeait un poulet tous les trois ou quatre mois ; ils en étaient désormais à un ou deux par mois en moyenne. Fin 2011, chaque foyer mangeait aussi huit œufs par mois en moyenne. De plus, les oiseaux supplémentaires rapportaient de l'argent. On a estimé qu'une famille moyenne possédant cinq poules et un coq à l'origine pouvait produire dix poulets par poule chaque année, donc en total cinquante poulets par an. Avant le projet, les familles pouvaient s'estimer heureuses si une poule parvenait à élever un ou deux poussins par couvée de douze. « Si chaque famille mange un poulet toutes les deux semaines, elle a toujours vingt-cinq poules à sa disposition qui peuvent se vendre entre 50 et 60 rands chacune, ce qui fait donc 1500 rands par an, dit Wethli. Sans compter la vente des œufs et le troc. » Clémentine Chiya, la vice-présidente du projet, déclare qu'elle n'avait pas conscience du potentiel productif des poulets. Son cheptel a doublé, passant de trente à soixante têtes, en comptant les poussins. « Maintenant nous ramassons des œufs tous les jours et je tue une poule chaque dimanche. Normalement, je n'en vends pas, mais si quelqu'un me le demande, je lui en vends une pour 50 ou 60 rands. Ce projet a changé ma vie, en mieux ! » Clémentine donne à son cheptel un complément alimentaire, notamment du maïs et des œufs. Durant les cours, les élèves ont appris à faire bouillir des œufs non-éclos puis à les hacher menu avec la coquille. Le produit final est répandu au sol le soir, afin d'encourager les poules à venir se percher, et apporte un supplément d'alimentation aux poussins. Nourriture et soins apportés aux poulets sont conçus pour coûter le moins cher possible et être entièrement renouvelables. « Les fermiers doivent fournir un poulailler de base et payer les quelques coûts de revient basiques, tels que les vaccins (environ 100 rands/an) ainsi qu'un peu d'aliments pour volaille, afin de réduire leur mortalité, dit Wethli. Mais ces coûts peuvent être amortis par la vente de trois ou quatre bêtes. On espère que les fermiers continueront leur bon travail, ce qui encouragera leurs voisins à s'impliquer eux aussi, contribuant ainsi à la sécurité alimentaire en milieu rural. » Extrait de Joubert (2012) |
L'élevage familial de volaille a été victime d'une mauvaise presse lors de la pandémie d'influenza aviaire hautement pathogène (H5N1) au début du siècle. En conséquence, des études épidémiologiques ont retracé l'itinéraire du virus, démontrant que cette maladie létale se développe surtout dans les régions à élevages très concentrés, où les mouvements entre cheptels prédisposés sont fréquents. L'élevage familial en Afrique rurale ne présente presque jamais de telles conditions. De plus, les mesures de biosécurité durables et idoines doivent correspondre au système de production en vigueur. Celles qui sont prévues pour la volaille d'élevage intensif ne conviennent pas à l'élevage extensif. Certaines initiatives impliquant les petits éleveurs dans la discussion de mesures biosécuritaires appropriées en Indonésie ont produit d'excellents résultats, comme le démontre le cas exposé ci-dessous :
Exemples indonésiens de meilleures pratiques biosécuritaires en élevage familial de volaille Le programme indonésien VBEC (Biosécurité, éducation et communication dans les villages) a commencé en août 2009 par une évaluation socio-culturelle tant qualitative que quantitative, dans six villages pilotes, et ce afin de permettre une meilleure compréhension des notions, croyances et pratiques communautaires en matière de gardiennage, maladies et déplacements des volailles. Durant cette phase, le rôle des officiers du département PDSR (Surveillance et ripostes participatives contre les maladies) et des membres du personnel des services régionaux du bétail était de fournir l'assistance technique et d'améliorer la prise de conscience sur les mouvements viraux et la prévention des maladies, aidant ainsi les membres de la communauté à développer leurs propres démarches de contrôle et de prévention des maladies dans le respect des conditions techniques locales. Il s'agissait là d'une démarche ascendante ; les communautés locales y ont pris l'initiative de travailler ensemble à la mise en œuvre d'une série d'activités réalistes de prévention et de contrôle de l'influenza aviaire hautement pathogène, en adéquation avec les conditions locales. Les plans d'action furent discutés dans chaque village sous la supervision d'un membre des services vétérinaires du district, afin d'assurer la continuité, la prise en compte du retour d'expérience et la validité technique des arguments. Les activités d'information, d'éducation et de communication visaient des groupes déjà existants, tels que les Posyandus (services d'hygiène intégrés aux villages), des groupes religieux ou des cercles de prière, des groupes d'entraide féminine, des églises et des mosquées, des élèves de cours élémentaires, d'écoles et de lycées, ainsi que divers autres rassemblements communautaires. Dans les villages où existaient déjà des éleveurs de volaille commerciale, on a délivré des messages de vulgarisation sur des techniques spécifiques, comprenant des discussions sur les problèmes de gestion, l'anatomie volaillère et la biosécurité pratique, le tout adapté aux systèmes de production concernés (FAO, 2010). Un autre projet centré sur le coût de la biosécurité dans l'élevage commercial à l'échelle familiale en Indonésie a fait d'excellents progrès en impliquant toutes les parties prenantes dans les activités liées à l'hygiène des volailles (ACIAR, 2010). |
Transformation, Commercialisation et Négoce
Dans la plupart des régions rurales de l'Afrique sub-saharienne, les consommateurs préfèrent les œufs issus de la production locale à cause de leur coquille marron et de leur jaune plutôt foncé. Les différences régionales ont leur rôle à jouer ; par exemple, dans le sud du Mozambique, on considère que les poules frisées sont plus efficaces lors des cérémonies traditionnelles, aussi sont-elles vendues deux fois plus cher que les poules ordinaires. Dans les zones déficientes en réfrigération, les gens préfèrent acheter les bêtes sur pied. Dans quelques cas limités, les petits éleveurs vendent leurs volailles par l'intermédiaire de coopératives ou de franchises qui conditionnent des carcasses réfrigérées ou congelées, ou des œufs conditionnés commercialement. Le meilleur conditionnement des œufs diminue considérablement le taux de casse, et l'utilisation de barquettes en plastique lavables et réutilisables améliore l'hygiène. Les encouragements à investir dans de meilleures techniques de conditionnement de la viande blanche ont été entravés dans bien des pays africains par l'importation de poulet congelé bon marché.
La qualité de l'albumen des œufs de canes et de poules décline très rapidement si les œufs sont stockés à température ambiante, notamment dans les climats chauds. Des recherches ont montré que ces pertes peuvent être réduites en huilant les œufs au jour de leur ponte, ce qui maintient la qualité de l'albumen pendant plusieurs semaines à température ambiante (Torrico et al., 2011). Des études supplémentaires, portant sur les méthodes de réduction des coûts de revient du stockage des œufs crus, tels que le refroidissement par évaporation et le recours au silicate de potasse en solution, seraient bienvenues.
Beaucoup d'éleveurs familiaux de volailles sont déjà organisés en réseaux commerciaux, lesquels sont parfois calqués sur les groupes ethniques. Par exemple, les hommes de l'ethnie Frafra dans la région nord-est du Ghana dominent le négoce de la volaille, et ce jusqu'à Accra. La robustesse de ce réseau repose sur une forte demande en produits issus de l'élevage familial. Il est indispensable d'analyser de tels réseaux afin de déterminer leurs points forts et leurs points faibles, avant de prévoir de nouvelles interventions sur les marchés.
Il est donc nécessaire d'établir une commercialisation efficace si l'on veut réussir avec une entreprise d'élevage volailler à petite échelle. Les techniques de commercialisation appliquées à d'autres types de production peuvent également convenir à l'élevage familial. Par exemple, la diffusion d'informations commerciales par radio ou l'envoi de textos par téléphones mobiles peuvent aider les fermiers à réaliser des prix corrects pour leurs produits. Une autre possibilité serait de créer des marques officielles de produits volaillers, ce qui peut fonctionner dans les régions où le nombre de producteurs, de négociants et de consommateurs suffit à supporter le développement de produits de haute qualité.
Les négociants qui achètent des poulets sur pied à divers foyers puis les déplacent sur de longues distances ou qui les détiennent plusieurs jours, risquent de lourdes pertes, notamment à cause de la maladie de Newcastle (MN) et du stress thermique. Dans la majorité des cas, les négociants transportent la volaille eux-mêmes (par exemple, à bicyclette) ou louent un mode de transport (bus, taxi-brousse, parfois train, camion ou fourgonnette spécialisés). Dans un très petit nombre de cas, les services d'hygiène publique ou volaillère ont travaillé en amont avec les négociants et les transporteurs afin de divulguer des informations concernant la transmission des maladies ou les questions de santé volaillère. Une fois que les négociants connaissent des producteurs qui contrôlent la MN par vaccinations régulières, ils favorisent ces sources d'approvisionnement puisque leurs bêtes sont moins susceptibles de mourir pendant le trajet vers le marché. Voici un exemple concernant des marchands d'un village tanzanien :
Les marchands de poulets du village de Singida, Tanzanie Il existe deux associations qui représentent les marchands :
En 2004, quand on leur demanda quels étaient leurs principaux postes de dépense, les marchands répondirent : le coût des transports et les tarifs d'emplacement au marché, à quoi ils ajoutèrent que le poste le plus important était causé par les pertes dues à la MN. En 2009, suite aux campagnes de vaccination régulière contre la MN, celle-ci n'était plus considérée par les marchands comme une contrainte majeure. Singida regroupe les volailles d'éleveurs villageois collectées par des négociants d'ampleur moyenne qui les vendent sur des marchés aussi éloignés que Dar-es-Salam. L'Association volaillère de Mungumogi achète des volailles qui sont transportées par camion jusqu'à Dar-es-Salam. En 2009, de 2 000 à 2 500 volailles y étaient transportées par camion trois fois par semaine. |
Jusqu'à la panzootie due à l'influenza aviaire hautement pathogène (H5N1), on accordait peu d'attention à la désinfection des cages et des étals afin d'améliorer l'élevage et le négoce des volailles familiales. Au pire moment de la panzootie, il arrivait fréquemment que des donateurs fournissent l'aide nécessaire à l'achat de désinfectants commerciaux, dont l'usage pouvait rarement continuer lorsque cette aide prenait fin. On trouverait des alternatives utiles pour les petits négociants, transporteurs et producteurs, si l'on effectuait de nouvelles recherches appliquées aux procédures de décontamination moins coûteuses, telles que le recours à la lumière du soleil, à des bâches et des sacs en plastique noir qui génèrent des températures internes élevées, à la cendre et à l'enfumage.
Améliorer l'apport des services
Historiquement, les services vétérinaires dans les pays africains ont eu tendance à se consacrer plutôt aux espèces ruminantes, au détriment des volailles. Lorsque la volaille fait l'objet de leur attention, les services se concentrent généralement sur la production intensive en zones péri-urbaines. En de nombreuses occasions, des conseils vétérinaires sont dispensés aux fermiers par des services de vulgarisation liés aux fournisseurs commerciaux de volailles et d'intrants.
Les services de vulgarisation dans le domaine du bétail et de la volaille ont toujours eu tendance à favoriser les producteurs et les négociants mâles. Femmes et enfants éleveurs de petits cheptels ont rarement été pris en compte par les services de vulgarisation. Cependant, des résultats positifs ont été obtenus là où ces groupes ont été abordés par diverses démarches allant de l'enseignement modulaire de l'élevage familial de volaille à l'école primaire jusqu'à de courtes séances de vulgarisation dispensées aux femmes patientes des maternités et des cliniques infantiles.
Du fait que l'élevage familial de volaille a reçu peu d'attention de la part des services officiels d'hygiène animale, l'étendue véritable des contraintes subies par le secteur est rarement reconnue. Les taux de mortalité et de pertes au sein de la volaille élevée en famille sont forts à cause des maladies (par exemple, les éruptions de MN peuvent tuer de 50 à 80 % des poulets d'un village en une année, dans certains pays endémiques), de la prédation et de la malnutrition (voir encadré ci-dessous). Les petits fermiers sont habitués à voir leurs bêtes mourir régulièrement de maladies et continuent à recourir à des stratégies de récupération (exemple : vente et consommation sur place) afin de réduire les pertes financières. L'évolution des tests de terrain rapides pour le dépistage de la grippe aviaire a fortement contribué à diagnostiquer cette affection mais il existe peu de tests rapides et fiables d'autres maladies. Les techniques épidémiologiques participatives peuvent aider d'identifier les symptômes prioritaires afin de permettre aux laboratoires d'analyse de concentrer leurs efforts. De plus, l'épidémiologie participative permettrait aux services officiels de collaborer avec les producteurs et de bénéficier ainsi des connaissances locales.
L'inadéquation des aménagements de la chaîne du froid pour stocker les produits biologiques tels que vaccins et antibiotiques constitue un souci majeur pour les services d'hygiène animale du monde entier, notamment dans les pays en voie de développement. Les coûts d'achat et de transport des produits biologiques et les coûts de la main-d'œuvre associée sont effectués en pure perte si le produit s'avère ne plus être efficace faute d'un stockage adéquat.
L'une des contraintes majeures pour le petit élevage intensif de volaille est le manque de contrôle-qualité de la ration volaillère commerciale. De nombreux petits producteurs de rations ne disposent pas d'installations qui permettraient de vérifier la composition nutritive, et les laboratoires vétérinaires manquent souvent des équipements et des réactifs nécessaires. Cela a pour conséquence que les éleveurs qui achètent des rations mal formulées ne savent qu'ils ont un problème que lorsque leurs oiseaux perdent leur productivité.
Les formulaires de recensement animalier tels qu'on les utilise dans de nombreux pays reflètent aussi un intérêt limité envers la volaille. Elle y est fréquemment enregistrée sous la seule rubrique « Quantité de volailles », sans tenir compte du nombre respectif des divers types de volailles qu'élève le producteur. Sans ces informations spécifiques, il sera difficile pour les ministères gouvernementaux de se mettre correctement au service des producteurs, des négociants et des consommateurs de volailles.
L'un des problèmes primordiaux qui entravent dans de nombreux pays la bonne marche des services d'hygiène volaillère et ceux des autres animaux est la discontinuité hiérarchique due à la décentralisation des activités gouvernementales. Alors que les services d'hygiène humaine réussissent en général à maintenir leur suivi hiérarchique (ce qui permet une bonne coordination des activités d'hygiène humaine), les services d'hygiène animale bénéficient rarement d'une telle structure régulatoire. Par exemple, afin de mettre en œuvre des activités de contrôle des infections animales, l'autorité centrale doit coordonner toutes les activités régionales. Les ressources en temps et en argent nécessaires à cette coordination peuvent entraîner la perte du contrôle sur les maladies animales et la dissémination sans confinement de nouvelles maladies.
Conclusions
La sécurité alimentaire durable est une question primordiale tant à l'échelle locale que nationale et mondiale. Même si la production à petite échelle de volailles à faible coût et écodurable n'apporte pas de réponse à tous les problèmes découlant de l'insécurité alimentaire et d'un choix de métiers limité, elle offre, tant aux éleveurs qu'aux consommateurs, des options peu onéreuses et relativement neutres sur le plan du bilan-carbone, avec un potentiel d'optimisation des marchés pour les espèces indigènes à forte valeur et leurs produits dérivés. Les gouvernements et les chercheurs seraient bien avisés de passer méticuleusement en revue les chaînes de valeur de l'élevage familial de volailles afin d'identifier les questions prioritaires pour que les interventions scientifiques, technologiques et innovantes puissent contribuer à l'amélioration de la chaîne, tant pour l'approvisionnement en œufs, en oiseaux sur pied, réfrigérés, congelés qu'en d'autres produits volaillers à valeur ajoutée. L'édification de compétences techniques, entrepreneuriales et gestionnaires fournira les fondations d'une production volaillère familiale durable, puisqu'elle contribue à créer des métiers durables en milieu rural.
Références
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Joubert, R. 2011. Improving the ‘Zulu chicken’. Farmers’ Weekly (South Africa), 9 March 2012.
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Torrico, D.D., No HongKyoon, Sriwattana, S., Ingram, D. et Prinyawiwatkul, W. 2011. Effects of initial albumen quality and mineral oil-chitosan emulsion coating on internal quality and shelf-life of eggs during room temperature storage. International Journal of Food Science & Technology 46 (9): 1783-1792.
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