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Les arguments en faveur de la biotechnologie dans l'agriculture africaine

Author: Walter S. Alhassan, Accra

Date: 27/12/2004

Introduction:

Le défi : La production des aliments et la diminution de la pauvreté demeurent les objectifs principaux des efforts visant à favoriser le développement socio-économique en Afrique et le bien-être de sa population. Les possibilités d'augmentation de la production des aliments au moyen de l'expansion des zones cultivées sont limitées, de même que celles de l'utilisation des fertilisants agrochimiques et de l'irrigation. L'accroissement de la production représente la clé pour l'avenir de l'Afrique. Le défi consiste à développer des technologies d'amélioration de l'agriculture pour les agriculteurs pauvres en ressources employant un minimum de moyens externes dans des milieux qui sont déjà tourmentés par tant de stress biotique et abiotique. La biotechnologie moderne a été reconnue comme la technologie la plus efficace qui sauvera l'Afrique des effets des pénuries alimentaires, de la même façon que la "révolution verte" y était parvenue pour les pays de l'Asie du Sud-Est dans les années 1970.


 

Applications
La Convention sur la Diversité Biologique définit la biotechnologie moderne comme 'l'application de techniques mettant en oeuvre in vitro des acides nucléiques, y compris l'acide désoxyribonucléique (ADN) recombinant et les injections directes d'acide nucléique dans les cellules ou les organites.'

La biotechnologie moderne a des conséquences énormes pour l'agriculture, l'environnement, la médecine et l'industrie. En agriculture, plusieurs outils incontestés issus de la biotechnologie moderne sont déjà en usage, tels que la culture tissulaire, la sélection assistée par marqueurs (phytogénétique moléculaire), les diagnostics et la production moderne de vaccins recombinants. L'utilisation de la culture tissulaire permet de produire d'importantes quantités de plants propres (exempts d'organismes pathogènes) propagés végétativement qui sont les clones d'un tissu végétal spécifique. Il s'agit là de l'outil biotechnologique le plus appliqué actuellement en Afrique.

La caractérisation de l'ADN et l'emploi de gènes marqueurs associés à la sélection de caractères spécifiques souhaités, peuvent contribuer largement à accélérer l'amélioration des récoltes au moyen de procédés de sélection classiques. Les diagnostics moléculaires permettent d'identifier rapidement et avec précision les pathogènes avant que des dommages ne puissent être détectés visuellement. Les vaccins recombinants produits au moyen de techniques biotechnologiques modernes sont très puissants et ne provoquent que peu d'effets secondaires.

Ces outils biotechnologiques modernes, appliqués simultanément à d'autres technologies diffusantes (telles que les pratiques agronomiques améliorées et la transformation des produits agricoles), le soutien du marché, le crédit agricole et l'infrastructure rurale pourraient contribuer pour beaucoup à l'évolution de l'agriculture en Afrique. C'est toutefois l'emploi d'organismes génétiquement modifiés (OGM) ou bien de produits d'ingénierie génétique qui pourraient déclencher une vraie révolution. L'ingénierie génétique est utilisée comme dernier recours lorsque les moyens traditionnels ou conventionnels pour résoudre des problèmes sont très difficiles ou trop longs à mettre oeuvre. Plusieurs plants à récolter génétiquement modifiés sont déjà utilisés ou en cours de développement actif pour traiter les problèmes qui touchent les récoltes en Afrique. Il s'agit entre autres du maïs Bt et du coton Bt résistant aux insectes, du manioc résistant aux virus, des variétés de bananes et de la banane du paradis résistant à la maladie foliaire du bananier Sigatoka, du maïs et du riz bio-fortifiés, enrichis en vitamine A, et de fruits produisant des vaccins comestibles.

L'utilisation de plantes résistant aux insectes nuisibles et aux pathogènes permettra de réduire au minimum l'emploi de produits agrochimiques, ce qui entraînera des avantages évidents pour la biodiversité (grâce à la diminution de résidus de pesticide nuisibles) ainsi que pour la santé des agriculteurs (moins de cas d'empoisonnement). En dépit des avantages reconnus de l'emploi d'OGM dans l'agriculture, il existe des risques perçus associés à leurs effets possibles sur la santé humaine et sur l'environnement. Des barrières réglementaires de bio-sécurité ont ainsi été mises en place afin de pouvoir garantir que les OGM soient au moins aussi sûrs que leurs pendants conventionnels non MG.

Etat de la biotechnologie et de la biosécurité en Afrique
La culture tissulaire, la caractérisation de l'ADN, la sélection assistée par marqueurs et les diagnostiques moléculaires sont les outils biotechnologiques actuellement utilisés. Jusqu'à présent, la biotechnologie concernant la modification génétique (GM) est encore très limitée et elle ne s'applique qu'en Egypte, au Kenya, en Afrique du Sud et au Zimbabwe. Le Burkina Faso a très récemment mis en place des essais au champ pour le coton Bt. A l'exception de l'Afrique du Sud, aucun de ces pays n'a encore commercialisé un quelconque produit génétiquement modifié.

Les signataires du Protocole de Carthagène sur la biosécurité lors de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique ont convenu de mettre en place des mesures qui garantissent un transport sûr des OGM (ou des organismes modifiés vivants, OMV) dans les pays et lors de transferts transfrontaliers. Le Protocole est entré en vigueur le 11 septembre 2003 après avoir été ratifié par au moins 50 pays.

En Afrique subsaharienne, seule l'Afrique du Sud et le Zimbabwe ont introduit une législation relative à la biosécurité. Le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Kenya, le Niger et l'Ouganda ont élaboré une législation à un degré avancé de la discussion. Les autres pays ont entamé le processus ou doivent encore commencer le développement de leurs projets de biosécurité.

Vers l'avenir
En Afrique, le niveau de la compréhension relative à la biotechnologie et à la biosécurité est actuellement faible, de sorte que des activités de vulgarisation s'imposent. La construction de capacité pour la biotechnologie en rapport avec les produits GM et non GM doit être améliorée dans la vaste majorité des pays africains. Il existe également un besoin d'harmonisation au niveau régional des efforts pour le développement de produits et pour l'application de la législation et des règlements relatifs à la biosécurité. Il est essentiel que l'Afrique maîtrise la biotechnologie et qu'elle développe des produits appropriés à ses besoins. Avant tout, l'Afrique devrait avoir les moyens d'être son propre porte-parole dans les forums internationaux sur la sécurité et les risques des OGM.

Accra, 15 novembre 2003.

27/12/2004