Les aliments tropicaux représentent une opportunité de croissance agricole et économique importante pour de nombreux pays ACP. Cependant, alors que la production, la transformation et la commercialisation de certains fruits bien connus tels que les agrumes, les mangues, les avocats et les bananes ont profité d’investissements substantiels, par exemple pour la recherche et le développement, et surtout au profit des marchés d’exportation, de nombreux autres fruits tropicaux n’ont pas suscité le même intérêt. Ce dossier comprend deux articles principaux rédigés par des experts des pays ACP et de l’EU et fournit des liens vers des ressources documentaires pertinentes axées sur la transformation des fruits tropicaux. Il s’agit ici de mettre l’accent sur les difficultés et les opportunités de l’ajout de valeur pour les fruits tropicaux et d’offrir des orientations en matière de politique afin de soutenir le développement du secteur.
Dans le premier article, Ludovic Temple du CIRAD (France) explique la manière dont sont liés le développement du secteur horticole et les déterminants de l’innovation. Pour les principaux fruits tropicaux qui font l’objet d’échanges internationaux, les investissements étrangers, la recherche et le développement et les progrès technologiques (par exemple l’entreposage frigorifique) ainsi que les améliorations au niveau logistique ont été essentiels. Les normes internationales ont également favorisé l’innovation, et les normes émergentes telles que le commerce biologique et équitable créent de nouvelles opportunités de marché. Alors que les gros producteurs bien organisés et d’autres acteurs de la chaîne de valeur en ont retiré des bénéfices, la production et la transformation de fruits à l’échelle familiale n’ont pas su répondre aux exigences des grands distributeurs. Les petits producteurs sont également réticents à prendre le risque d’investir dans de nouvelles technologies, telles que l’introduction de variétés novatrices qui résistent aux maladies. Il reste encore à accélérer l’adoption de nouvelles technologies et améliorer la coordination à leur profit.
Dans le deuxième article, Machel A. Emanuel et Noureddine Benkeblia de l’Université des Indes occidentales en Jamaïque, exposent les défis liés au développement de l’industrie jamaïcaine de l’akée (Blighia sapida K.D. Koenig). Si l’akée est bien acceptée par les Jamaïcains, elle reste assez mal connue dans de nombreux autres pays ; elle peut potentiellement contribuer à la croissance de l’économie jamaïcaine si l’industrie est en mesure d’accroître sa pénétration des marchés d’exportation internationaux. Cependant, l’akée contient une toxine, l’hypoglycine A, qui pose problème du point de vue des critères de sécurité alimentaire. D’autres difficultés freinent le développement du secteur, notamment la disponibilité d’une variété adaptée à la transformation en quantité suffisante. La recherche et le développement technologique ont soutenu la croissance du secteur, mais des problèmes demeurent. En 1972, la Food and Drug Administration des États-Unis rend pratiquement impossible l’importation d’akées en provenance de la Jamaïque en fixant une limite supérieure de 100 mg/kg d’hypoglycine A. En 1990, une procédure de détection précise est mise au point, ce qui permet la reprise de l’importation des fruits testés aux États-Unis. Néanmoins, en 2005, l’exportation d’akées en direction du marché américain est encore une fois suspendue pendant près d’un an pour des raisons techniques. Actuellement, seules les entreprises agro-alimentaires certifiées procédant à des contrôles de sécurité alimentaire peuvent exporter des akées en conserve qui ne seront pas automatiquement saisies. Une croissance plus poussée du secteur requiert un effort concerté de la part des chercheurs, des ingénieurs, des décideurs, des investisseurs et des entrepreneurs, y compris des agriculteurs, afin de soutenir ce secteur axé sur l’exportation qui reste fortement dépendant de la confiance des consommateurs étrangers. L’expansion du secteur des fruits tropicaux dans les pays ACP ne repose pas seulement sur la coordination et l’amélioration de la production et de l’efficacité logistique, mais nécessite également une approche systémique. Ce dossier a été compilé et révisé par le CABI et le CTA en juin 2012