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Peut-on éradiquer la faim à l’horizon post-2015 en continuant à traiter l’alimentation comme une marchandise ?

Author: Jose Luis Vivero Pol

Date: 29/02/2016

Introduction:

Les statistiques sur la faim dans le monde, qui dépeignent un monde qui progresse de façon remarquable, servent à justifier les idéologies économiques prédominantes (productivisme, néolibéralisme et privatisation des ressources). Le présent texte propose une analyse approfondie de ces données (sous-alimentation, malnutrition chronique) et met en garde contre les interprétations biaisées. Régi par le système alimentaire industriel déterminé par le marché, le monde ne se porte pas très bien et l'OMD1 sur la lutte contre la faim n'a clairement pas été atteint. La loi de l'offre et la demande ne parviendra jamais à éradiquer la faim, comme l'affirment les Objectifs de développement durable pour l'après-2015, car le marché n'est nullement incité à offrir de la nourriture à ceux qui n'ont pas d'argent pour payer ces ressources vitales. Il est nécessaire qu'intervienne un changement fondamental et que soit établi un contrat social selon lequel la nourriture est considérée comme un bien de première nécessité pour tous et la nutrition comme un bien public. Le concept de nourriture pour tous fait référence à l'équité, la coopération, la résilience et la démocratie directe du niveau local au niveau mondial. Le présent texte fournit des éléments normatifs et pratiques en vue d'effectuer la transition vers la durabilité, qui a lieu actuellement dans de nombreuses sociétés rurales traditionnelles et qui est intégré à nombre d'initiatives collectives citoyennes pour la faim. Nous devons tous réaffirmer notre rôle en tant que citoyens-mangeurs et pas seulement comme consommateurs-mangeurs.


 

Peut-on éradiquer la faim à l’horizon post-2015 en continuant à traiter l’alimentation comme une marchandise ?
Le changement de paradigme que l’on n’ose même pas envisager : l’alimentation comme un bien commun

Jose Luis Vivero Pol, Unité BIOGOV, Centre de Philosophie du Droit, Université catholique de Louvain, Place Montesquieu 2, Louvain-la-Neuve B-1348, Belgique.

Introduction
Les agences de l’ONU basées à Rome chargées des questions de l’alimentation et de la faim (FAO-FIDA-PAM, 2014) affirment que dans le monde, 795 millions de personnes ont souffert de sous-alimentation chronique[2] pendant la période 2014–2016, ce qui représente 216 millions de personnes en moins, comparée à la période 1990 – 1992. Selon ces chiffres, l’on est passé d’un taux de 18,6 % à un taux de 10,9 % (soit une baisse de 21,4 %).

Le graphique n° 1 montre que dans les pays en développement, la sous-alimentation a baissé, pour passer  de 23,3 % en 1990 à 12,9 % en 2015. Ainsi, l’objectif du Millénaire pour le développement (OMD) est quasiment atteint.

Les Nations Unies ont fait l’éloge de ces chiffres comme une magnifique réussite en matière de développement, pour ne pas dire un franc succès («la courbe contre la pauvreté le plus réussie de toute l’histoire») (Nations Unies, 2015.

Graphique 1 : Évolution de la sous-alimentation dans les régiones en développement: progrès actuel et prévu dans le cadre des OMD et du SMA

La FAO collecte et analyse les données relatives à l’indicateur de sous-alimentation en utilisant la même méthode depuis des années, révisée plusieurs fois depuis (la dernière révision remontant à 2012). Avant cette révision, le monde en développement était en deçà de l’objectif de réduction de la faim, avec une hausse notable de la faim en 2008 – 2009, en raison de la crise alimentaire. Cette révision a complètement inversé la tendance, qui montre d’importants progrès en matière de réduction de la faim, sans augmentation pendant les pires années (elle a seulement stagné en 2008 – 2009), comme le montre un graphique de l’IFPRI[3].

Quels sont les progrès réalisés dans le monde en matière de réduction de la faim ?
Plusieurs auteurs ont critiqué la manipulation des paramètres statistiques lors de la révision de 2012 (par exemple la modification des seuils, des points de départ et des formules pendant la durée de l’OMD) visant à dépeindre une tendance favorable pour la réalisation de l’OMD 1. Le chiffre actuel de 795 millions correspond à une consommation calorique supposée nécessaire pour un mode de vie sédentaire. Moore-Lappé et al. (2013) ont estimé, d’après les données de la FAO, que si l’on tient compte d’un seuil calorique plus élevé pour une activité non sédentaire[4], 1,33 milliard de personnes étaient sous-alimentées de manière chronique en 2012. Caparros (2014) a lui aussi dénoncé la façon dont les statistiques sur la faim sont calculées par la FAO, le FIDA et le PAM de sorte à présenter une tendance positive. Étant donné que les progrès absolus en matière de réduction de la faim (sous-alimentation) n’étaient pas si remarquables, la FAO a revu le chiffre absolu de départ de 1990 à la hausse, en le faisant passer de 823 à 1010 millions de personnes dans son dernier rapport. Par ailleurs, sans remettre en question les chiffres de la FAO, Haddad (2014) a déclaré que mis à part les performances exceptionnelles de la Chine, le reste du monde ne s’en sortait pas si bien que ça. Le développement économique et social de la Chine a sorti 138 millions de personnes de la faim, ce qui représente une baisse totale de la sous-alimentation de 65 % au cours des deux dernières décennies[5]. En chiffres absolus et en pourcentage, l’Afrique compte aujourd’hui plus de personnes souffrant de la faim qu’en 1990.

Plus récemment (2016), Hickel explique d’une manière cohérente comment la collecte statistique des chiffres mondiaux sur la faim fait miroiter une image de réussite qui ne correspond pas à la réalité. Il mentionne que 2 milliards de personnes souffrent de la faim en appliquant correctement les données et les seuils de la FAO.
En résumé, la faim diminue, certes, mais moins vite et de façon plus inégale que ce que les statistiques présentées veulent bien nous faire croire, sans parallèle avec la croissance constante du PIB mondial depuis 1980 (635 % en 35 ans[6]). Les progrès actuels permettraient d’éradiquer la sous-alimentation d’ici à 2084 plutôt qu’à 2030 (Haddad, 2014). En fin de compte, le monde en développement n’a pas atteint l’objectif du Sommet mondial de l’alimentation (fixé en 1996) visant à la réduction de moitié du nombre de personnes sous-alimentées d’ici à 2015. Les manipulations bureaucratiques (Kirk et al., 2015 ; Pogge, 2010), qui ont dilué l’objectif absolu initialement ambitieux du SMA lors des négociations des OMD, ont consisté à modifier les chiffres absolus selon leur prévalence et à reculer la date de départ (de 2000 à 1990).

Qu’en est-il de la malnutrition chronique ?
Les objectifs de développement durable[7] (également dénommés « post-OMD » ou « pour l’après-2015 ») font l’objet de longs débats, et une proposition finale devrait être négociée lors du prochain Sommet de New York sur l’après-2015 (Siège de l’ONU, septembre 2015). L’objectif de développement durable n° 2 « Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable » représente une obligation morale ambitieuse, tandis que l’objectif 2.2, plus spécifique, introduit un ensemble d’objectifs mesurables et plutôt contradictoires : mettre fin à toutes les formes de malnutrition d’ici à 2030 (à savoir, retard de croissance, émaciation, sous-alimentation, insuffisance pondérale, anémie et obésité[8]) en réalisant les objectifs fixés au niveau international en matière de retard de croissance et d’émaciation chez les enfants de moins de 5 ans d’ici à 2025[9] . Mettre fin au retard de croissance d’ici à 2030 implique de totalement éradiquer la faim chronique, ce qui semble difficile si l’on en croit les chiffres historiques du taux annuel moyen de régression absolue (TAMRA) indiqué dans le tableau 1, même dans les pays ayant obtenu d’excellents résultats ces dernières années (État de Maharashtra en Inde, Bolivie et Guatemala) ou sur de longues périodes (Brésil, Mauritanie).

Le monde fait régresser le retard de croissance à un rythme de 0,67 % par an (TAMRA), et le tableau 1 montre que le taux pré-OMD était supérieur ou égal au taux post-OMD. Une récente estimation de la régression du retard de croissance à l’horizon 2025 (De Onis et al., 2013) fixe un TAMRA encore plus faible (0,4 %), prévoyant 127 millions d’enfants souffrant d’un retard de croissance d’ici à 2025 (20 %). Les 194 États membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont adopté six objectifs visant à améliorer l’alimentation maternelle, périnatale et infantile, approuvés par la 65e Assemblée mondiale de la santé en 2012. L’un d’eux consistait à réduire de 40 % le retard de croissance d’ici à 2025, par rapport aux chiffres de 2010. Le tableau 1 montre que cet objectif représente un TAMRA de 0,7 %, légèrement supérieur aux records historiques (1990 – 2011), nettement supérieur aux tendances estimées mais résolument en deçà des objectifs absolus, justes et scientifiquement possibles (Vivero, 2013a) (comme en attestent les cas de pays engagés et performants dans le tableau 1).

Tableau 1 : Décompte historique et projections d’évolution de la réduction du retard de croissance dans le monde et en Amérique Latine

Le tableau 1 (voir le PDF téléchargeable en bas de page pour une meilleure lecture) montre une régression constante et régulière du retard de croissance depuis 1990 (TAMRA de 0,7–0,6 %), avec peu « d’effet stimulant des OMD » visible. Les cas de réussite de certains pays prouvent qu’il est possible de faire régresser le retard de croissance plus rapidement (TAMRA de 1,5 %) sur une période d’au moins une décennie, même si plus la période est longue et le retard de croissance est faible, plus cela devient difficile en ce sens que la malnutrition résiduelle s’ancre dans les secteurs marginaux les plus pauvres de la société (les dénommés « ultra-pauvres », Ahmed et al., 2007)[10] . L’après-2015 se voulant ambitieux et transformateur, l’objectif de régression du retard de croissance devra être revu à la hausse si l’on veut réellement éliminer la faim d’ici à 2030.

D’après la FAO, la région Amérique latine & Caraïbes (ALC) a déjà atteint l’OMD n° 1 ainsi que l’objectif du SMA, et affiche la meilleure progression en matière de réduction de la faim, avec une diminution de près de deux tiers depuis le début des années 1990 (FAO-FIDA-PAM, 2015). Cette baisse est attribuable à de forts engagements politiques, à des politiques alimentaires adaptées et à des cadres juridiques basés sur le droit à l’alimentation, ainsi que des investissements publics suffisants et soutenus. Cette région a lancé l’initiative « L’Amérique latine et les Caraïbes libérées de la faim » en 2005, avec un objectif de Faim zéro pour 2025, une initiative saluée à plusieurs reprises au plus haut niveau politique lors de manifestations mondiales, régionales et sous-régionales.

Les données régionales sur le retard de croissance fournies par De Onis et al. (2013) et l’UNICEF-OMS-BM (2014), bien que différentes, montrent que les progrès réalisés par la région ALC en matière de régression du retard de croissance sont inférieurs à la moyenne mondiale (0,5 % d’après De Onis et al., 2013 et 0,3 % d’après l’UNICEF-OMS-BM, 2014), même s’ils sont suffisants pour réduire de moitié la prévalence des cas de retard de croissance (qui est passée de 14,9 % en 1990 à 7,4 % en 2013).

Ainsi, il semblerait que l’impact des initiatives mondiales ou régionales ne se traduise pas par une augmentation des taux de régression. L’élan politique semble davantage reflété par le maintien de la tendance plutôt que par son amélioration.

Le paysage alimentaire mondial et ses failles systémiques
Beaucoup mangent peu pour permettre à d’autres de manger mal et pour pas cher, et la production alimentaire est devenue un moteur majeur pour exploiter l’environnement au-delà de ses capacités. Les besoins croissants d’eau et de nourriture résultant de la croissance démographique, du changement climatique, des changements de consommation en faveur de régimes à base de viande et du développement des biocarburants ne feront qu’exacerber les défis déjà critiques en termes de limites de la planète, ainsi que de sécurité alimentaire et de nutrition. Si l’on extrapole les tendances actuelles de consommation et de production alimentaires, l’humanité aura besoin de trois planètes d’ici à 2050 pour pouvoir répondre à la demande. Peut-on éradiquer la malnutrition chronique dans un tel scénario, tout en continuant à considérer l’alimentation comme une marchandise ? Ne serait-il pas plus sage, plus équitable et plus durable de considérer la nourriture comme un bien commun, ou un bien semi-privé devant être régi comme un bien commun, et la sécurité alimentaire et nutritionnelle comme un bien public mondial ?

L’alimentation est devenue une marchandise privée, transnationale et monodimensionnelle sur un marché mondial de grande consommation (Fischler, 2011). Les mécanismes de privatisation des ressources communes par voie législative, les prix excessifs et les brevets ont limité l’accès à l’alimentation en tant que bien commun, tandis que la conception sociale de l’alimentation comme une marchandise dénigre ses propriétés non-économiques en faveur de ses caractéristiques marchandes, à savoir la durabilité, la beauté extérieure et la normalisation des produits alimentaires naturellement variés. Cela a conduit à négliger les propriétés nutritionnelles des aliments pour privilégier les calories bon marché.

L’industrialisation et la marchandisation des denrées ont permis à l’humanité d’accroître la production alimentaire et de donner accès à l’alimentation à des millions de personnes. Elles ont aussi entraîné l’inégalité, l’inefficacité et la non-viabilité, ainsi que l’appréciation monodimensionnelle de l’alimentation comme une marchandise. Les sociétés transnationales qui dominent le système alimentaire industriel constituent de puissants vecteurs de malnutrition et de dégradation de l’environnement. Leur but est en effet d’accumuler et de faire baisser le prix des ressources alimentaires en fonction de leur apport calorique (Monteiro et al., 2011) et de maximiser les profits des entreprises alimentaires plutôt que de promouvoir les avantages nutritionnels et sanitaires de l’alimentation pour tous. On ne parviendra pas à corriger ces problèmes en se contentant de faire l’éloge du développement durable (Godfray et Garnett, 2014), qui couvre essentiellement les défis technologiques et qui cache les déséquilibres sociaux et de pouvoir.

L’aspect multidimensionnel de l’alimentation est évincé par la marchandisation : la nutrition est reléguée au second plan
L’évolution de l’alimentation comme simple marchandise va à l’encontre de notre survie, de notre propre identité et de la vie en communauté : l’alimentation est un besoin nutritionnel élémentaire de l’homme (Maslow, 1943) ; le pilier de chaque culture nationale (Montanori, 2006) ; un droit fondamental qui devrait être garanti à chaque citoyen (Nations Unies, 1966) et une ressource naturelle impliquant une production durable. Son approche en tant que marchandise confond valeur et prix (en interprétant sa valeur comme son prix). Sous le capitalisme, la valeur d’usage (besoin biologique) est complètement dissociée de la valeur d’échange (prix sur le marché) (Timmer et al., 1983), et les prix ont primauté (McMichael, 2009). L’alimentation comme simple marchandise peut faire l’objet de spéculations de la part des investisseurs, de modifications génétiques et de brevets de la part des entreprises, et même servir à d’autres usages que la consommation humaine dans le simple but de maximiser les profits. La qualité nutritionnelle est occultée par la priorité donnée à l’augmentation des retours sur investissement, et dernièrement, les discours tentent même de démontrer la rentabilité financière de la réduction de la faim (IFPRI, 2014), tant la maximisation des profits semble régner sur le monde, au détriment des raisons morales et politiques.

Le régime industriel (néolibéral) de l’alimentation définit un ensemble de règles institutionnalisant le pouvoir des entreprises dans le système alimentaire mondial, ce qui accroît la marchandisation de l’alimentation en occultant totalement ses dimensions non monétaires (Pechlaner et Otero, 2010). Les règles du marché ne font pas que fixer le prix des produits alimentaires. En fin de compte, elles corrompent leur nature originelle (Sandel, 2012). La marchandisation explique les causes profondes de l’échec du système alimentaire mondial (Magdoff et Tokar, 2010 ; Zerbe, 2009). Par conséquent, le revirement structurel le plus révolutionnaire consiste à reconsidérer les multiples dimensions de l’alimentation pour les êtres humains, et à regarder au-delà de son prix artificiellement bas sur le marché.

Néanmoins, les principales analyses des failles du système alimentaire mondial et l’existence même de la faim ne remettent pas en cause la nature de l’alimentation en tant que bien privé (FAO, 2012 ; gouvernement britannique, 2011 ; Nations Unies, 2012 ; Banque mondiale, 2008 ; Forum économique mondial, 2013 ; OMS, 2014). En dépit des efforts déployés au sein du système des Nations Unies (Kaul et al., 2003), la sécurité alimentaire et nutritionnelle n’est pas considérée comme un bien public mondial, pas plus que l’alimentation n’est envisagée comme un bien commun.

La « re-communification » de l’alimentation : approches innovantes des progrès historiques
La « re-communification » de l’alimentation passe par un changement des discours économiques et politiques relatifs à la production alimentaire, à la consommation et aux aspects éthiques. C’est souvent suite à des choix stratégiques délibérés que les biens deviennent privés ou publics. L’exclusion et la rivalité, notions utilisées pour définir les biens privés/publics/communs, sont des conceptions sociales, et leur portée dépend de la nature du bien, du taux de consommation/d’utilisation, des avancées technologiques et de la définition et de l’application des droits de propriété délimités par les prérogatives, les dispositions réglementaires et les sanctions. Il est donc conseillé de revisiter la considération économique de l’alimentation en tant que bien privé si l’on veut parvenir à éradiquer la faim dans le monde.
En fait, l’alimentation n’a pas toujours été considérée comme une simple marchandise. Nombreuses sont les sociétés qui ont considéré, et qui considèrent toujours, l’alimentation comme un bien commun, au même titre que la terre, l’eau, les forêts et la pêche et la qualification que les différentes civilisations attribuent aux biens communs destinés à l’alimentation est relativement diversifiée et particulièrement changeante. On trouve des exemples bien documentés de biens communs vivants et fonctionnels destinés à l’alimentation à chaque extrémité de l’échelle du développement (Vivero, 2014), comme les pêcheries de homard aux États-Unis, les éjidos au Mexique, les élevages de coquillages en Espagne et les terrains communaux dans toute l’Afrique. L’utilité agricole et connexe des biens communs pour les sociétés humaines a permis leur survie, en dépit des vagues d’enclosure, d’appropriation indue et de privatisations légales.

Vers la considération de l’alimentation comme un bien commun
Ces 20 dernières années ont connu deux courants parallèles d’actions civiques collectives pour l’alimentation : le Mouvement pour la souveraineté alimentaire (MSA)[11]  et les Réseaux alimentaires alternatifs (RAA)[12] . Même si le MSA doit encore peaufiner les questions légitimes relatives à une alimentation locale et saine, au retour à la nature et aux formes moins polluantes de consommation alimentaire de la part des consommateurs urbains, son importance stratégique est de plus en plus appréciée. Les RAA doivent eux aussi accorder plus d’importance aux revendications agraires faites par les mouvements ruraux. L’alimentation est une arme puissante de transformation sociale et la convergence future de ces deux mouvements devrait marquer un tournant dans la gouvernance du système alimentaire mondial et national, en ce sens qu’ils constituent des vecteurs organisationnels de changement dans la transition vers un régime de bien commun de l’alimentation.

Ce régime de bien commun de l’alimentation permettrait de revaloriser les différentes dimensions de l’alimentation, en réduisant sa dimension commerciale qui en fait une simple marchandise. Une gouvernance évolutive du système alimentaire est en cours de construction, grâce à des initiatives ascendantes locales, urbaines et rurales. Les éléments matériels et immatériels destinés à l’alimentation d’ores et déjà considérés comme des biens communs incluent : (a) les plantes et les animaux comestibles produits par la nature, (b) les ressources génétiques destinées à l’alimentation et à l’agriculture, (c) les connaissances agricoles traditionnelles, (d) les connaissances agricoles modernes basées sur la science générées par les institutions publiques, (e) la cuisine, les recettes et la gastronomie nationale, (f) la sécurité alimentaire, (g) la nutrition, y compris les déséquilibres en matière de faim et d’obésité et (h) la stabilité des prix des produits alimentaires.

Le régime de bien commun de l’alimentation serait régi de manière polycentrique par les citoyens-mangeurs (Gomez-Benito et Lozano, 2014) en développant des démocraties alimentaires (Lang, 2003 ; De Schutter, 2014) qui apprécieraient les différentes dimensions de l’alimentation (Vivero, 2013b).

Particulièrement pertinente pour les débats et l’accord final sur l’après-2015, la transition vers un régime de bien commun de l’alimentation et vers un scénario de « Faim zéro » nécessite un genre d’État différent, un État partenaire, avec des devoirs et des compétences différentes, pour diriger cette transition qui requiert partenariat et innovation plutôt que commandement et contrôle. Les pouvoirs publics doivent soutenir les biens publics ruraux et urbains existants et encourager la création de nouveaux biens communs pour leur valeur sociétale. Le défi pour le secteur privé doit être dicté par un changement de philosophie tout en continuant à faire du profit : conserver un esprit d’entreprise, mais axé sur des objectifs sociaux et la satisfaction des besoins. L’agro-écologie, l’agriculture familiale et des formes de production plus socialement intégrées, telles que les coopératives et les entreprises sociales, en sont des exemples. En limitant l’influence de l’approvisionnement du marché et en encourageant (politiquement et financièrement) le développement d’autres modes d’approvisionnement alimentaire (nationaux ou communautaires), il est possible de reconstruire un système alimentaire tricentrique plus équilibré composé d’un État partenaire qui cherche à maximiser le bien-être des citoyens, d’entreprises sociales adoptant une philosophie différente qui réponde à des besoins non satisfaits, et d’actions civiques collectives en matière d’alimentation qui renouent les liens communautaires, qui produisent et consomment des aliments obtenus à partir de ressources axées sur les biens communs et qui valorisent l’alimentation différemment.

Un discours transformationnel pour l’éradication de la faim à l’horizon post-2015
Il y a un siècle, les sociétés occidentales ont compris que le marché, régi par des intérêts personnels, n’offrirait pas suffisamment de biens publics, comme la santé et l’éducation, qui présentent d’énormes avantages pour les êtres humains, mais qui ne sont pas monétarisés, car ces externalités positives ne pouvaient pas être saisies par les acteurs privés. Des programmes de couverture maladie universelle et d’enseignement primaire universel, garantis par les États et considérés comme des biens publics, se sont alors développés un peu partout. Ils s’inscrivent désormais dans l’horizon post-2015 comme des objectifs souhaitables à l’échelle mondiale. Or, l’alimentation et la nutrition ne faisaient pas partie de ce contrat social.

Il faut un nouveau contrat social dans lequel l’alimentation est considérée comme un bien commun et la nutrition, comme un bien public, un discours nécessaire pour développer des programmes de couverture alimentaire universelle au niveau national, similaires à ceux mis en place dans le domaine de la santé et de l’enseignement. Les règles de l’offre et de la demande ne permettront jamais d’éradiquer la faim dans le monde comme le veut l’accord non encore ratifié sur l’après-2015, car le marché n’incite absolument pas à donner accès à l’alimentation à ceux qui n’ont pas d’argent pour s’offrir une ressource vitale.

Contrairement au marché, l’alimentation comme bien commun repose sur les notions d’équité, de collectivité, d’appartenance et de démocratie directe, que ce soit à l’échelon local ou international. Cela appelle à un changement radical de paradigme, en abandonnant la théorie selon laquelle la compétitivité individuelle est un vecteur de progrès par le biais d’une croissance permanente, au profit de l’idée selon laquelle la coopération collective est un vecteur de bonheur et de la conception de bien commun. Il faut développer un système alimentaire qui, premièrement, garantisse une alimentation durable pour tous et deuxièmement, qui ait un sens, et pas seulement une utilité, pour la production, la commercialisation et la consommation alimentaires.

Conclusion
Ces dernières années, on assiste à une manipulation des statistiques mondiales sur la faim, pour attester des progrès obtenus en matière de développement par l’idéologie économique dominante (néolibéralisme darwinien). Or, comme indiqué plus haut, le monde ne s’en sort pas si bien que cela, avec un système alimentaire industriel totalement axé sur le marché. Un changement de paradigme qui considère l’alimentation comme un bien commun et qui développe des cadres politiques et juridiques conformes à cette vision s’impose.

La « re-communification » de l’alimentation signifierait que l’éradication de la faim n’est pas seulement un devoir de l’État, puisque les entreprises sociales et les communautés locales devraient, elles aussi, s’acquitter de leurs obligations vis-à-vis des autres êtres humains (citoyens-mangeurs plutôt que clients-consommateurs). Or, ce n’est qu’une idée parmi d’autres, une théorie alternative qui devra remporter la bataille épique des idées (Brewer et Karafiath, 2014) et qui fait actuellement son apparition. Les changements sociétaux sont entraînés par des guerres de culture, des paradigmes idéologiques et le renouvellement permanent des théories sociales dominantes et des cadres de valeur. Faisons de l’alimentation un bien commun et de la nutrition, un bien public ! Si l’on veut éradiquer la faim et la malnutrition pour l’après-2015, il est indispensable de considérer les produits de base comme un bien commun.

Notes :

[1] Unité BIOGOV, Centre de Philosophie du Droit, Université catholique de Louvain, Place Montesquieu 2, Louvain-la-Neuve B-1348, Belgique. http://biogov.uclouvain.be.

 [2] La sous-alimentation est un indicateur du nombre de calories estimé à partir de l’offre alimentaire totale au niveau national (production + importations nettes), divisé par le nombre d’habitants pour calculer la disponibilité par habitant. Les populations ayant un apport énergétique inférieur au seuil minimum sont considérées comme étant sous-alimentées.

 [3] http://ebrary.ifpri.org/cdm/ref/collection/p15738coll2/id/127438

 [4] Pour gagner leur vie, les plus démunis sont généralement obligés de travailler dur physiquement, ce qui nécessite un apport calorique journalier plus élevé.

 [5] Si l’on exclut la Chine, le taux de pauvreté dans le monde a lui aussi augmenté, avec 108 millions de personnes de plus qu’en 1981 (Kirk et al., 2015).

 [6] http://www.economywatch.com/economic-statistics/year/

 [7] https://sustainabledevelopment.un.org/focussdgs.html

 [8] Je suis tout à fait d’accord pour que l’obésité et le retard de croissance soient associés à des maladies d’origine alimentaire, mais je m’oppose totalement à ce qu’il en soit de même pour le surpoids, en ce sens que la dénutrition due à la pauvreté (qui n’est pas un choix) ne saurait être comparée à une surconsommation volontaire (qui, elle, est un choix).

 [9] https://sustainabledevelopment.un.org/focussdgs.html

 [10] Ce sera clairement le cas en Chine, qui a affiché une régression absolue de 45 % du retard de croissance en 1990–2011 et où le TAMRA devrait baisser au cours de la période post-2015.

 [11] Mouvement essentiellement rural de producteurs de denrées alimentaires issus de pays en développement qui remet en cause l’équilibre du pouvoir dans la gouvernance des systèmes alimentaires au niveau mondial et national, en contestant l’idéologie dominante du système alimentaire industriel « low-cost ».

 [12] Réseau essentiellement urbain (qui lui-même ne se considère pas encore comme un mouvement) d’actions civiques collectives pour l’alimentation qui cherchent à acquérir, à produire et à partager des produits alimentaires par d’autres moyens, en raccourcissant les chaînes alimentaires, en produisant elles-mêmes des denrées alimentaires, en réévaluant les dimensions non-commerciales de l’alimentation et en encourageant les liens communautaires (convivialité, intendance, co-production, mise en commun des connaissances).

Références

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29/02/2016