L’évolution du paysage de la coopération internationale de l'UE dans le domaine de la recherche et de l’innovation : quelles sont les opportunités si les pays ACP investissent dans leurs propres capacités de recherche agricole pour le développement ?
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Cornelia E. Nauen
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Mundus maris – Sciences et Arts pour la Durabilité asbl, Bruxelles, Belgique.
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Tout changement commence avec le savoir local
L’amélioration durable du bien-être humain repose fondamentalement sur le savoir, sa production, son organisation, sa distribution, son appropriation et son utilisation judicieuse. L’accès à l’information, la capacité à générer et à utiliser des connaissances scientifiques et technologiques ainsi que des innovations humaines sont un atout pour les organisations et les pays. Pour les pays ACP, les efforts de développement menés dans le passé et qui ont négligé les conditions, les technologies et les systèmes de savoir locaux ont gâché énormément de temps et des ressources précieuses sans obtenir le résultat désiré, à savoir le « développement durable ».
Nous assistons à une prodigieuse diversification et accélération de la production de savoir via l’élargissement des applications scientifiques et technologiques. Ce phénomène modifie les conceptions sur ce qui est digne d’être su et transmis d’une génération à l’autre, par le biais des canaux scolaires formels et de l’apprentissage intergénérationnel au sein des familles, entre pairs et depuis d’autres sources. En parallèle, nous risquons de perdre une partie du savoir local et des expériences ayant fait leurs preuves, par exemple ce qui est codifié dans les systèmes de savoir autochtone, quand la discontinuité technologique rend ce savoir moins désirable sur le plan social et parfois pratique. Comment pouvons-nous fonder des décisions sur la combinaison de sources la plus actuelle ? Existe-t-il des exemples de projets de collaboration mondiale ? (Voir encadré 1)
Encadré 1 – FishBase, le répertoire Web mondial de la biodiversité piscicole
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Des futurs durables
Par rapport à de nombreuses technologies modernes, les techniques traditionnelles ont fait leur preuves dans la durée : elles sont efficaces, peu coûteuses, disponibles localement et appropriées sur le plan social et culturel. Ce savoir est ancré dans l’esprit et les pratiques des agriculteurs du monde entier, dans leur sélection d’une très grande variété de semences de plantes utilisables, adaptées à toutes les niches écologiques et à toutes les conditions de production et de consommation. Mais les préoccupations liées à la sécurité alimentaire ont stimulé les techniques d’intensification dans l’agriculture, avec notamment une hausse des investissements dans la biotechnologie moderne.
Plus de 3 000 espèces de plantes sont utilisées comme sources alimentaires. D’importants efforts internationaux dans le domaine de la génétique et de la biotechnologie ont été déployés pour améliorer la production de variétés à rendement supérieur et résistantes aux maladies, et pour accroître la productivité par hectare de quelques cultures clés, comme le riz, le maïs et le blé – des céréales de base pour de vastes populations humaines. D’autres cultures telles que la pomme de terre, le mil, le sorgho, le manioc, les haricots, ou encore le bétail et le poisson n’ont pas bénéficié d’un tel intérêt. Les efforts étaient également axés sur l’étude de systèmes agricoles entiers et sur les moyens d’assurer la fertilité des sols, le contrôle des parasites et des maladies, la qualité des produits pour différents besoins commerciaux et de transformation, et plus encore. Cependant, comme la vulgarisation publique dans les pays en développement (pays ACP compris) a diminué sous l’effet des programmes de réforme économique dans les années 1980, tels que les ajustements structurels, les liens entre la recherche et les producteurs se sont affaiblis et leur capacité d’innovation en a pâti.
Les modèles industriels d’agriculture dirigés par le secteur privé nécessitent généralement des apports en capital conséquents et fonctionnent mieux avec des agriculteurs/investisseurs capables d’investir dans le savoir technique, les semences hybrides avec leurs exigences d’engrais et de contrôle des parasites et, surtout, avec des producteurs disposant d’un bon accès aux importants marchés urbains, à l’échelle locale ou internationale. Des tendances similaires sont observables dans l’élevage de bétail, la production de produits laitiers, de poissons et de fruits de mer.
Les agriculteurs du futur
Des résultats préliminaires d’études de réévaluation de la production piscicole mondiale remettent en cause la fiabilité de certains modèles qui ont influencé la façon dont l’industrie de la pêche est présentée à travers les statistiques mondiales. Les chiffres fournis par la plupart des pays concernant les prises de leur pêche artisanale sont en deçà de la vérité, tout comme les rejets des pêcheries, ce qui entraîne une sous-estimation considérable de l’extraction globale (voir encadré 2).
Encadré 2 – Les petits producteurs traditionnels, un groupe trop grand pour être ignoré Les statistiques mondiales sur la production piscicole sont compilées par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) à partir de données et d’estimations nationales communiquées par ses pays membres. Le projet pluriannuel Sea Around Us (http://www.seaaroundus.org) comprend des reconstructions détaillées de prises et vérifie l’exactitude de ces statistiques officielles. Des résultats partiels indiquent une réelle sous-estimation, en particulier des pêches artisanales (Harper et Zeller, 2009, 2011). Ces pêcheries ont une importance capitale pour la sécurité alimentaire locale. Elles produisent pour la subsistance mais aussi de plus en plus pour les marchés, parfois même pour les marchés internationaux. Des estimations de rejets et de prises accessoires considérables, en particulier pour les pêcheries industrielles, ont entraîné de nouvelles corrections des véritables extractions. Le risque de pêche illicite, non déclarée et non réglementée, et d’un fréquent étiquetage mensonger des produits nuit à la capacité de fournir des évaluations réalistes destinées à la prise de décision. |
La production terrestre assurée par des agriculteurs de subsistance (souvent des agricultrices) est en grande partie sous-représentée dans les statistiques officielles. La majeure partie de la recherche et de l’attention et du soutien des gouvernements est consacrée à des approches technologiques (et technocratiques) de la production à grande échelle, soit l'autre extrémité du spectre. Les petites et moyennes exploitations, la production de spécialité ou de niche et l’agriculture péri-urbaine se situent quelque part entre les deux.
Le métier d'agriculteur du futur dépendra du type d’alimentation demandé par les consommateurs et les marchés (en grande partie dominés par les multinationales). Jusqu’en 2010 environ, la concurrence sur le marché avait conduit à la faillite la moitié des exploitations agricoles des pays industrialisés. La taille de l’exploitation moyenne augmentait parfois, mais souvent les terres étaient abandonnées car jugées non viables du point de vue économique. Quel type d’agriculteurs les pays ACP et de l’UE veulent-ils pour le futur ? Cette question va bien au-delà d’une étroite perspective sectorielle ou de l’amélioration technique.
Dans le cas de l’UE, les réformes agricoles de 1992 ne sont pour l’essentiel pas mises en œuvre par les États membres, même si la législation et les politiques (c’est-à-dire la législation agro-environnementale et les mesures de type subventions) sont en place au niveau européen. L’UE a des politiques « à objectifs multiples » qui visent l’environnement, les fonctions paysagères et plus, mais une grande partie de l’agriculture de l’UE ne peut pas faire face à la concurrence sans subventions. Ainsi, soit l’agriculture devenait concurrentielle par le développement de nouvelles connaissances (à objectifs multiples), compatibles avec le système de l'Organisation mondiale du commerce (OMS), soit les pays de l’UE réduisaient ou même arrêtaient l’agriculture pour importer des produits de base et des denrées alimentaires « bon marché » de l’étranger. Pour diverses raisons, la deuxième option l’a emporté. La question des bio-carburants et l’augmentation du prix des denrées alimentaires qui l’accompagne ont obligé les grands producteurs à utiliser chaque mètre carré de terre pour la production. Malgré tout, les prix d’aujourd’hui sont deux fois plus élevés qu’en 2004 ! L’impact sur la sécurité alimentaire et l’« accès à la nourriture », en particulier pour les plus démunis, est évident.
Une intensification durable
La production alimentaire mondiale pourrait nourrir l’ensemble de la population humaine, même si l’on tient compte du fait que les mauvaises pratiques agricoles dans certains endroits et l’expansion urbaine, entre autres, entraînent une diminution des terres arables et que le changement climatique restreint les gains de productivité obtenus précédemment grâce à la biotechnologie. Cependant, on estime à 40 % le gaspillage des denrées alimentaires dans les pays industrialisés, tandis que des facteurs combinés, en premier lieu les coûts, font de l’accès à une quantité suffisante de nourriture de qualité adaptée un défi pour les personnes démunies – dans les pays ACP, l’UE et d’autres pays à revenu moyen et élevé.
Un système plus durable (1) répondrait aux besoins des pauvres en mettant l’accent sur une distribution plus équitable, et non pas nécessairement sur la croissance en tant que telle, et (2) fonctionnerait dans les limites de ce que la science, la technologie et d’autres systèmes de savoir nous aident à accomplir au sein des écosystèmes et des systèmes sociaux mondiaux. Il convient d’observer les différents systèmes de savoir qui sous-tendent ces modes de production et de consommation. Le savoir requis pour fonctionner le long de ce continuum de production varie énormément et s’étend à une organisation sociale, une manipulation, une transformation, une commercialisation adéquates, ainsi qu’à d’autres aspects de gestion. Il devrait être clairement relié à la compréhension de la gestion des agrosystèmes, à l'efficacité énergétique et aux choix énergétiques durables ainsi qu’aux connaissances sur la nutrition, la santé et la santé publique. Cela contribue à fixer des priorités pour les deux défis clés actuels de la durabilité.
Il serait peu judicieux de copier aveuglément un agrosystème emprunté autre part, un modèle de production particulier ou de se limiter à un spectre étroit de produits monopolistiques au détriment d’un mélange plus riche de modèles et de produits. Exploiter la diversité, la diversification et la complémentarité, et préférer les cultures alimentaires aux cultures énergétiques sont des stratégies de développement et de gestion des risques qui rendent les systèmes nationaux et régionaux plus solides et aptes à améliorer les résultats pour le bien-être humain, surtout lorsqu’ils sont soutenus par une recherche critique et multidimensionnelle s’appuyant sur le savoir local existant. L’accessibilité et l’acceptation sociale devraient être prises en compte dans les questions et les programmes de la recherche.
Les stratégies politiques doivent concilier les exigences sociales, économiques et environnementales pour l’amélioration durable des conditions de vie, pour la création d'exploitations viables et pour une consommation durable. La question se pose de savoir comment atteindre l’intensification en diminuant la consommation énergétique fossile, en maintenant les fonctions de stockage de carbone et en utilisant moins de pesticides et autres molécules synthétiques, étant donné leurs effets négatifs sur la santé des agriculteurs et leur apparition mondiale même dans des écosystèmes lointains sur terre ou en mer et donc chez les humains consommant des aliments provenant de ces écosystèmes.
Les politiques agricoles, énergétiques et rurales doivent prendre en compte la sécurité alimentaire, l’intensification durable et la diversification sans se limiter à une ou deux cultures commerciales dominantes, en trouvant des solutions au coût abordable adaptées aux situations locales, telles que des régimes fonciers et des conditions écologiques spécifiques qui impliquent des sécheresses et des inondations plus fréquentes, afin d’assurer un plus large développement rural et une amélioration de la productivité. Il s’agit de défis aux aspects multiples entre une production économiquement viable, la conservation ou la réhabilitation du milieu naturel avec notamment le maintien de la biodiversité agricole. À cela s'ajoutent l'objectif de la sécurité alimentaire et les besoins sociaux, y compris ceux des ménages dirigés par des femmes et d’autres foyers vulnérables. Une fertilité des sols préservée, voire améliorée, ainsi que la gestion de l’eau, d’autres ressources naturelles et d’écosystèmes entiers pour la restauration et la conservation à long terme sont de plus en plus considérées comme les bases de systèmes agro-alimentaires performants. La présence de politiques favorables et l’élaboration et la mise en œuvre de règles joueront un rôle essentiel. Une santé publique améliorée, des soins de santé pour la mère, l’enfant et la main-d’œuvre sont des facteurs favorables au même titre qu’une éducation scolaire généralisée et accrue à tous les niveaux.
Impact sur les questions de la recherche et les mécanismes de collaboration
Les systèmes agro-alimentaires, dont les cultures, le bétail, les pêches de capture et d’élevage, sont intégrés dans les écosystèmes marins, d’eau douce et terrestres et leur biodiversité, qui requièrent des études et une attention minutieuse. Les institutions humaines qui se sont développées autour de ces biens communs ont assuré une justice distributive et maintenu un réservoir de ressources dont les espèces exploitées et cultivées sont tirées et renouvelées. Du point de vue historique, ces biens communs se sont toujours situés là où les personnes aux ressources limitées pouvaient trouver de la nourriture, des fibres et de l’énergie (par exemple du bois de chauffe). Aujourd'hui, l'appropriation privée de terres exerce une pression grandissante sur ces filets de sécurité écologiques et sociaux, souvent invisibles. Pour vivre bien avec des ressources limitées, le patrimoine commun de ressources naturelles du monde entier et les institutions sociales qui le maintiennent méritent beaucoup plus d’attention de la part des chercheurs et des décideurs, et ce afin d’éviter de nous enfermer dans la tragédie de Hardin (1968), qui est moins généralisée que le document original ne le laisse entendre.
Le renouveau actuel des zones protégées et des parcs nationaux reprend des pratiques antérieures d’autolimitation, souvent fondées sur des tabous et croyances religieuses. Pour que ce phénomène puisse véritablement soutenir les écosystèmes assiégés, il faudra en parallèle une plus grande prise en compte des forces environnementales, sociales et économiques ainsi que le développement des institutions locales qui les soutiennent. Les enjeux environnementaux, en particulier la protection de l'eau et de l’air et la lutte contre le changement climatique et contre la pollution ont certes connu des progrès, mais ceux-ci sont encore souvent considérés comme évidents. De ce fait, ils sont régulièrement « sacrifiés » au profit d’impératifs sociaux à court terme, sans parler des gains économiques. La migration de zones aux ressources épuisées ou affectées d’une autre façon vers d’autres endroits encore sains et productifs était autrefois possible. Étant donné que de nos jours, les populations humaines occupent et affectent même les endroits les plus reculés de la planète, la science, la technologie et l’innovation sont désormais essentielles et doivent s’inspirer du savoir local traditionnel, là où il existe.
L'intégration de l’abondant savoir local et autochtone existant améliorera considérablement la capacité d’adaptation innovante à des situations en évolution. Car les informations et le savoir disponibles dans un endroit peuvent ne pas être reconnus et utilisés dans un autre. En général, donner un cadre à la recherche et à ses résultats par rapport au savoir et aux conditions locales implique davantage une évolution des mentalités qu’une capacité technique. Ainsi, les programmes de recherche locale donnent de meilleurs résultats (voir encadré 3) et la coopération internationale est également plus productive. Les défis et les opportunités interdépendants rendent la coopération internationale dans le domaine de la recherche et de l’innovation particulièrement utile, voire indispensable, car même les grands pays disposent de ressources limitées.
Encadré 3 – Davantage de concurrence, mise en contact de la recherche avec ses utilisateurs au Sénégal Pour répondre au besoin croissant de recherche et surmonter la fragmentation entre les principales organisations, le Ministère sénégalais a mis au point un Fonds National de Recherche Agricole et Agro-Alimentaire (http://www.fnraa.sn/), qui offre un financement concurrentiel visant à accroître la productivité agricole et créer des passerelles entre recherche de qualité, utilisateurs de la recherche, pouvoirs publics et partenaires de développement internationaux. Un représentant de la société civile participe activement au processus d'examen des propositions en compagnie d’évaluateurs scientifiques, indépendamment du contrôle du Ministère. |
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Coopération internationale en matière de recherche et savoir collectif
La coopération ACP-UE dans le domaine de la recherche et de l’innovation s’est développée au-delà de la participation aux programmes-cadres de recherche européens, généralement ouverts. Les INCO-Nets par région ou sous-région servent à soutenir le dialogue sur les politiques STI, l’établissement de programmes et le renforcement des capacités afin de consolider le cadre pour une coopération de recherche concrète dans de multiples configurations. Les INCO-Nets fonctionnent pour l’Afrique subsaharienne, les Caraïbes et le Pacifique, certains dans leur deuxième cycle :
- Le premier CAAST-Net (http://www.caast-net.org/)a pris fin en décembre 2012. Il a été suivi de CAAST-Net Plus (http://www.caast-net-plus.org/), avec de nouveaux partenaires (2013–2016).
- EUCARINET (http://www.eucarinet.eu) rassemble cinq partenaires européens et six partenaires caribéens.
- PACE-Net (http://www.pacenet.eu) était une initiative de coordination d’une durée de trois ans visant à favoriser le dialogue avec la région du Pacifique, suivie par PACE-Net Plus.
Les ERA-Nets avec une participation internationale servent de plateformes pour que les initiateurs de programmes de recherche puissent favoriser la coopération selon des priorités convenues. ERAFRICA (http://www.erafrica.eu) a permis aux deux parties de s’impliquer activement dans la définition de programmes et a par conséquent mobilisé des équipes de recherche, des ressources financières et un suivi. Les ERA-Nets avec moins de participation des pays ACP sont moins aptes à impliquer les organismes de financement. ERA ARD I et II (http://www.era-ard.org/) en sont un bon exemple. L’appropriation est depuis longtemps reconnue par les praticiens de la coopération au développement comme fondamentale pour que le progrès accompli trouve un écho dans les connaissances ou les bases locales, même lorsque des défis internationaux plus vastes, voire mondiaux, sont en jeu. Une concertation incomplète avec les partenaires africains a peut-être conduit à des résultats quelque peu mitigés, quand les recherches à plus petite échelle devaient être amplifiées grâce au financement des instruments de coopération au développement.
La Plateforme de partenariat africain-européen sur la recherche agricole pour le développement (PAEPARD, http://paepard.org/wakka.php?wiki=PagePrincipale&lang=fr) énonce de grands objectifs et une ouverture pour faciliter la collaboration entre les organisations d’agriculteurs, les organisations de la société civile, les instituts de recherche, les établissements d'enseignement, les entreprises privées et les réseaux politiques, mais a connu des difficultés pour obtenir l’adhésion de ces partenaires potentiels. Les initiateurs ont mobilisé 7 millions d’euros lors de la première édition du projet (dont 5,5 millions de la part de l’UE), alors que les partenaires du projet n’ont apporté que des contributions financières modestes. Ainsi, des « plateformes satellites » portant sur des domaines spécifiques importants sur le plan scientifique et socio-économique et destinées à susciter un intérêt accru parmi les institutions partenaires et les organisations de la société civile font encore défaut. Il apparaît difficile d’obtenir la confiance et la pratique nécessaires pour cristalliser les expériences issues de situations très diverses en un savoir et une action collectifs plus intégrés.
Encadré 4 – ERAFRICA – un exemple réussi de recherche cofinancée par des agences africaines et européennes ERAFRICA ERANET est la première initiative de pays européens et africains pour financer conjointement des projets de recherche collaborative dans le cadre de la Coopération internationale du PC7. ERAFRICA a été mis au point pour faciliter la mise en réseau des bailleurs de fonds pour la recherche et l'innovation africains et européens et travailler à des appels à projets communs. L’accord concerne des ministères et pouvoirs publics de 15 pays (10 pays européens et 5 pays africains) : Afrique du Sud, Allemagne, Autriche, Belgique, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Égypte, Finlande, France, Kenya, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Suisse et Turquie. Les appels et procédures pour l’évaluation et l’attribution de fonds ont été développés par le projet « ERA-Net for Africa » doté de 2 millions d’euros et d’une durée de trois ans, qui s’est tenu du 01/12/2010 au 30/11/2012. Les facteurs clés pour réunir les importantes ressources financières de la part des bailleurs de fonds africains et européens étaient la propriété commune des agences africaines et européennes, leurs efforts pour répondre aux véritables besoins de la société, l’apprentissage mutuel, le renforcement de la coopération bilatérale et la liberté de fonctionnement, qui ont encouragé une gestion de qualité et l’innovation. Les organismes de financement ont recueilli plus de 10 millions d’euros pour leur premier appel, avec 801 participants pour 122 propositions et une sur-souscription de 6:1, faisant aujourd’hui l’objet d’une évaluation indépendante pour le financement. |
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Quelques conclusions provisoires sur l’évolution des paysages scientifiques
Le paysage de la coopération dans les domaines de la recherche et de la science connaît une évolution certaine. Alors que les universités, les établissements de recherche et d’autres comprennent la nécessité de coopérer, de s’associer à l’élite de leurs domaines et d’attirer les jeunes chercheurs d’où qu’ils viennent, l’orientation récente des politiques en faveur d’une compétitivité indéterminée et généralisée pourrait aller à l’encontre de la coopération, du moins au niveau régional. Cependant, la capacité à coopérer s’inscrit dans la « compétitivité » que les pays mettent en œuvre pour concevoir des solutions aux enjeux de société qui dépassent leurs propres moyens.
Au niveau européen, on remarque un engagement plutôt moindre de plusieurs États membres à s’impliquer dans la coopération internationale, malgré le maintien ou l’accroissement des efforts dans le domaine, mais à partir d’une plateforme nationale. L’intensification de la recherche et de l’innovation dans un plus grand nombre de pays diversifie le paysage international et crée pour les pays ACP de nouvelles opportunités d’investir dans leurs capacités de recherche agricole pour le développement et de valoriser leur savoir auto-généré et ancré dans les systèmes de savoir autochtone. L'accès libre aux résultats de la recherche publique est une avancée positive, qui permet de réduire les coûts de transaction, d’accélérer les progrès dans la compréhension et d’assurer une plus large utilisation par les entreprises et d’autres parties prenantes.
La Communication de la Commission européenne (2012a) « Pour un meilleur accès aux informations scientifiques : dynamiser les avantages des investissements publics dans le domaine de la recherche » le démontre bien. Le plan d’action de la Commission européenne (2012b) pour la Conférence du G8 sur l’ouverture des données publiques dans l’agriculture indique plusieurs activités concrètes, notamment des projets de recherche. Les pays et institutions ACP profiteront d’une participation active, avec une meilleure diffusion de l’information – aussi bien de données que d’illustrations des implications des résultats de la recherche pour les décideurs politiques, entre autres. Intensifier la recherche dans l’agro-alimentaire et des domaines connexes importants pour le bien-être humain durable, de manière critique et en liaison avec les parties prenantes, permettra de relier la recherche aux réalités du terrain et de faciliter l’adoption, de la part des agriculteurs comme de la part des décideurs politiques.
Remerciements
Je souhaite exprimer ma reconnaissance à Gerasimos Apostolatos du programme de coopération internationale de la Commission européenne (INCO) pour la recherche et l’innovation pour sa lecture critique, ses observations substantielles et ses suggestions. Il a également fourni la présentation visuelle des données sur la participation des équipes de recherche des pays ACP et de pays situés dans d’autres régions ainsi qu’une note explicative spécifique sur les caractéristiques et facteurs de réussite de la coopération ERAfrica entre organismes de financement de la recherche africains et européens.
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Références
Commission européenne. 2012a. Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions. Pour un meilleur accès aux informations scientifiques: dynamiser les avantages des investissements publics dans le domaine de la recherché.
http://ec.europa.eu/research/science-society/document_library/pdf_06/era-communication-towards-better-access-to-scientific-information_fr.pdf (consulté le 27 juillet 2013).
Commission européenne. 2012b. European Commission Action Plan: G-8 International Conference on Open Data for Agriculture. https://docs.google.com/file/d/0B4aXVC8hUc3oZlVEdlZ1RVJvZms/edit?pli=1 (consulté le 27 juillet 2013).
Hardin, G. 1968. The Tragedy of the Commons. Science 162 No. 3859, 1243-1248.
Harper, S. et Zeller, D. Eds. 2009. Fisheries catch reconstructions: Islands, Part I. University of British Columbia. Fisheries Centre Research Reports 17, 5. http://hdl.handle.net/2429/41025 (consulté le 27 juillet 2013).
Harper, S. et Zeller, D. Eds. 2011. Fisheries Catch Reconstructions: Islands, Part II. University of British Columbia. Fisheries Centre Research Reports 19, 4. http://www.fisheries.ubc.ca/webfm_send/114. (consulté le 27 juillet 2013).
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